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© Ville de Nantes.
Cédric Enyenge-Essombe, ingénieur territorial à Nantes, revient sur la récente requalification du square de l’Amiral Halgan. Un bel exemple de travail collaboratif ayant redonné ses lettres de noblesse à cet espace alors jugé peu sûr par les riverains.
Oui, car ces lieux vivent. C’est un fait de société : la population change au gré du contexte local, des projets immobiliers, de la démographie... Cela a une incidence sur la fréquentation des lieux mais également sur le profil des usagers. S’il y a un relâchement – voire parfois une simple transformation qui laisse plus de place à la nature – en termes d’entretien des végétaux ou de propreté, cela peut avoir un impact direct sur le sentiment de sécurité des habitants.
Le sentiment d’insécurité y était devenu très fort et les problèmes de tranquillité fréquents. Ce petit square créé dans les années 1940 s’est petit à petit dégradé et la palette végétale s’est amoindrie au fil des ans. Par ailleurs, la population qui le fréquentait par plaisir était souvent alcoolisée et accompagnée de chiens, ce qui faisait fuir les autres habitants. Des plaintes récurrentes nous parvenaient au sujet de la consommation d’alcool et de drogue dans les arbustes, si bien que les jardiniers ne pouvaient plus y travailler correctement.
Avant-après. Le square de l’Amiral Halgan a été entièrement repensé par les personnels des espaces verts de la ville de Nantes. À gauche © DR et à droite © Ville de Nantes.
Les personnels des espaces verts se sont réapproprié les lieux, de la conception à la gestion des travaux. Avec l’accord de la mairie, nous avons travaillé en lien direct avec les habitants et les assistantes maternelles pour adapter notre offre aux souhaits des familles et des riverains. Ce projet n’était en effet viable que si la population s’impliquait aussi, pour contrebalancer les dynamiques actuelles. La police municipale a également participé à chaque étape du projet. Nous avons fermé le square un mois pendant les travaux.
Oui, cela a été l’occasion d’intégrer des jeux pour enfants et un composteur de quartier régi par une association soutenue par la collectivité. Cette aire de jeux a d’ailleurs permis d’interdire le square aux chiens, décision que nous avons pleinement assumée car d’autres espaces verts sont accessibles aux propriétaires de chiens dans le quartier. Nous avons aussi éliminé les écrans végétaux pour limiter la consommation d’alcool et de drogue.
Le square de l’Amiral Halgan dispose aujourd’hui d’une aire de compost et d’une aire de jeux pour enfants. © Ville de Nantes.
Nous avons décidé de communiquer sur la réouverture du square avec une inauguration en bonne et due forme le 21 juin 2019, jour de la Fête de la musique. Depuis, nous avons constaté une réelle amélioration : la mixité est retrouvée et les marginaux ne sont plus dominants sur ce site, même s’ils restent présents. Des pique-niques ainsi que des jeux de pétanque s’organisent régulièrement. Il y a même eu un apéro-géant suivant une cérémonie de mariage civil.
C’est toutefois un équilibre fragile. Même si on a cassé la dynamique, les mauvaises habitudes sont fortes. Dès qu’on constate du désordre, on alerte la police municipale pour faire respecter le règlement mis en place. Il s’agit du respect de la population mais aussi du respect des jardiniers qui doivent pouvoir être motivés à travailler sur ce type de lieu.
La vraie satisfaction, c’est d’avoir mené ce travail en régie, d’avoir mobilisé tout le monde pour obtenir de vrais résultats. Quand tu as créé un site, tu es plus motivé pour l’entretenir !
Les tables de pique-nique du square sont aujourd’hui plébiscitées par les riverains. © Ville de Nantes.
Il faut tenir compte de toutes les plaintes : il y a des trous dans les cheminements, l’aire de jeu se dégrade, des chiens sont en liberté alors qu’ils devaient être tenus en laisse… Un dispositif qui centralise les alertes de la population permet par exemple d’être prévenu en temps réel des situations que l’on ne peut pas suivre au quotidien. Notre devoir est d’apporter des réponses, à chaque signalement quel qu’il soit, en faisant une analyse fine sur le terrain. Les usagers sont nos yeux et nos oreilles, car nous ne sommes pas toujours présents sur les sites !
Le végétal ne résout pas à lui seul les problèmes de sécurité et de tranquillité. Il s’agit dans un premier temps de penser au détournement d’usage, et ce à chaque phase du projet. Imaginer l’impossible : que va-t-il se passer ? Qui va vraiment utiliser les infrastructures ?
Il s’agit ensuite d’assurer une présence humaine. Sans des jardiniers pour entretenir, des agents de propreté et des ateliers pour réparer, un site devient très rapidement insalubre... Il faut donc avoir les moyens de ses ambitions. Si on veut offrir des espaces verts appréciés, appréciables et qui vivent, il faut avoir des budgets en conséquence.