« Aujourd’hui, la végétation peut et doit être utile ! »

Fabien Kouachi, directeur des missions de sensibilisation de l’Observatoire français de l’apidologie
Point de vue - Le 05 septembre 2019


Fabien Kouachi. © Pierre MaravalFabien Kouachi, directeur des missions de sensibilisation de l’Observatoire français de l’apidologie, fait état des bonnes pratiques pour participer activement à la lutte contre la disparition des abeilles.

Quels sont les facteurs à l’origine de la mortalité croissante des abeilles ? Est-ce encore possible d’agir pour inverser la tendance ?

L’usage des pesticides et des intrants n’est pas l’unique cause de la disparition des abeilles, car cette dernière est multifactorielle. C’est l’addition de plusieurs causes qui crée des stress traumatiques chez ces insectes, comme le manque de nourriture induit par le réchauffement climatique ou encore la monoculture. À date, le taux de mortalité des populations d’abeilles est passé à 30 % par an en Europe… Selon l’IPBES et l’ONU, les abeilles sont en train de vivre leur 2e extinction de masse depuis celle des dinosaures. Or, il est encore temps de changer de comportement car la nature peut encore se régénérer. Nous sommes conscients qu’il faut un certain temps pour modifier les habitudes sociétales et encore plus de temps pour constater les éventuelles améliorations. C’est pourquoi tout un chacun peut dès à présent décider de mettre en œuvre les bonnes pratiques !

Quels aménagements peuvent être faits concrètement à l’échelle des communes pour enrayer ce phénomène ?

On peut passer de l’uniquement « beau » au « bien » : la végétation d’ornement peut et doit être utile. Il faut encourager les citoyens à créer davantage d’espaces mellifères au printemps, en ville comme à la campagne. Une abeille peut parcourir jusqu’à 5 km pour trouver de la nourriture, ainsi les campagnes peuvent alimenter les abeilles des villes en nectar si elles mettent à leur disposition de nombreux espaces de plantes mellifères. Tout espace végétalisé est bon à prendre !

L’idéal serait que chaque commune crée sa propre réserve naturelle de fleurs mellifères, sorte d’espace protégé pour les abeilles et la petite faune dans son ensemble. Des ruches pourraient même y être intégrées, sous réserve de la supervision d’un apiculteur local. L’OFA est actuellement en train de créer une première réserve mellifère de ce type dans le sud de la France et a vocation à développer des partenariats avec d’autres communes pour reproduire l’expérience. Nous pensons notamment à créer un label officiel pour apporter visibilité et légitimité à ces sites.

Quel entretien est à prévoir pour les plantes mellifères ?

Contrairement à d’autres plantes ornementales, les plantes mellifères attirent les insectes, et par conséquent regorgent d’organismes vivants. Il est donc important de garantir un arrosage régulier, notamment en période de sécheresse, par les agents d’entretien de la ville. Certaines plantes peuvent quant à elles être laissées en jachère. L’important est de toujours faire appel à un semencier professionnel pour être guidé dans ses choix et ne rien laisser au hasard.

En tant que directeur des missions de sensibilisation de l’OFA, vous travaillez sur deux campagnes pour sensibiliser le grand public ainsi que les enfants à la cause des abeilles…  

Le premier projet, « Des Fleurs pour les abeilles », incite les citoyens à planter des graines de plantes mellifères. Le second, « L’école des abeilles », est un projet pédagogique porté par des « ambassadeurs » volontaires et bénévoles pour sensibiliser les enfants de 7 à 10 ans à la cause des abeilles. Il n’est pas obligatoire d’être un professionnel des abeilles pour devenir ambassadeur : des experts comptables comme des membres de la collectivité nous ont rejoints pour transmettre le projet pédagogique aux enseignants. Les ateliers sont organisés avec les professeurs autour de mallettes pédagogiques officielles fournies par l’OFA. Cette initiative a rencontré un grand succès dans de nombreuses villes à travers la France, touchant plus de 10 000 enfants et adultes. L’objectif à terme est de développer les partenariats avec des écoles de métropoles comme Paris et Marseille.

Pour en savoir plus sur les Fleurs pour les abeilles, c’est par ici :
Prendre contact avec M. Fabien Kouachi.

visuel : Fabien Kouachi. © Pierre Maraval

A lire aussi
« La nature est créatrice de valeur sur les lieux de travail » Pierre Darmet, directeur marketing et innovation des Jardins de Gally et secrétaire fondateur du Cibi Point de vue - Le 17 octobre 2019
« L’agriculture urbaine donne un nouveau souffle aux espaces abandonnés » Guillaume Morel-Chevillet, responsable végétal urbain à l'institut technique de l'horticulture ASTREDHOR Point de vue - Le 12 décembre 2019