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IME Soubiran. © Agence Ménard / VAL’HOR Les Victoires du Paysage
Depuis 2010, de plus en plus d’établissements de soins s’appuient sur les jardins thérapeutiques afin de réduire le stress et l’anxiété des patients. Des espaces verts pleinement intégrés aux processus de guérison.
Au sein de l’institut médico-éducatif de Soubiran (Villepinte, 93), plus 2 700 m2 de jardins accueillent des enfants et des jeunes adultes atteints d’autisme. Conçu par des paysagistes concepteurs (Agence Ménard) sur le thème d’« Alice au pays des merveilles », cet espace alterne des zones de détente et de jeux conçus pour stimuler les 5 sens des pensionnaires et leur apporter un apaisement mental. Il permet ainsi aux patients de tester la relation de leur corps à l’espace en toute sécurité. « Le jardin est de plus en plus investi et devient un véritable outil thérapeutique au service des enfants et des professionnels », explique la directrice de l’institut, Christine Manadi. « Ce lieu de vie, de découverte et d’expression apporte une autre dimension dans l’accompagnement des enfants et adolescents accueillis. »
Les jardins thérapeutiques, dont les effets sur la santé mentale des patients sont constatés par les professionnels de soins, se développent de plus en plus. En milieu hospitalier, il a été constaté qu’en reconnectant le patient à la nature, le jardin thérapeutique influe sur son état d’esprit comme sur celui des patients, de leurs proches et des soignants. La présence de plantes dans la chambre d’hôpital réduit par ailleurs la sensation de douleur et d’anxiété ainsi que la consommation d’analgésiques, tandis qu’une réduction de la durée d’hospitalisation a été observée1.
Le premier jardin thérapeutique en milieu hospitalier a été créé en 2010 par Thérèse Jonveaux, neurologue à l’hôpital Saint-Julien (Nancy) à destination des patients en rééducation ou souffrant d’Alzheimer, ainsi que d’autres en soins palliatifs. Pour la neurologue, ces espaces permettent de trancher avec l’intérieur des hôpitaux « froids, souvent sans couleurs, et qui ont tendance à générer du stress et une perte de repères ». Au sein du jardin de l’établissement, les patients viennent trouver la paix et se ressourcer tout en ayant l’impression d’être ailleurs le temps d’une promenade. « Le jardin est un lieu vivant dont l'aspect change en fonction des saisons mais aussi de la météo, alors que la chambre d'hôpital la mieux décorée restera toujours un endroit figé, statique, souligne la psychologue Émeline Nasson2. [Dans le jardin de Saint-Julien], il y a aussi toute une dimension sensorielle avec les parfums, les couleurs mais aussi le bruit de l'eau des fontaines ou encore les cerises ou les mirabelles que l'on va cueillir sur l'arbre. »
La mise en œuvre de tels espaces est l’œuvre d’une réflexion à la fois médicale et paysagère.
Lors de la création du jardin thérapeutique au sein du parc public des Camellias à Alès, en 2015, son directeur Bernard Pical résumait : « Les médecins ont apporté leur savoir, et nous, professionnels du jardinage, en avons fait la théâtralisation. » Une mise en scène qui ne va pas sans contraintes ! La lisibilité du paysage est en effet primordiale pour les patients utilisateurs des jardins thérapeutiques, quelle que soit leur pathologie. Les cheminements qu’ils empruntent, notamment pour les personnes désorientées, doivent être soigneusement réfléchis pour ne pas présenter d’obstacles ni de culs-de-sac, générateurs d’angoisses. Les plantations, arbres, sculptures et bancs, servent de repères dans l’espace. « Lorsqu'une plante est abîmée ou arrachée, nous la remplaçons aussitôt pour que cela perturbe le moins possible », explique Philippe Ledogar, responsable des espaces verts de l’hôpital Saint-Julien, qui consacre une demi-journée par semaine à l'entretien du jardin thérapeutique. Les mécènes ont compris l’intérêt des jardins thérapeutiques : dans le cas de l’IME Soubiran, la région Île-de-France, la mairie de Villepinte, la fondation Bettencourt Schueller ou encore le Comité national Coordination Action Handicap (CCAH) ont participé à sa création.
Si le jardin thérapeutique gagne du terrain et séduit de plus en plus d’acteurs publics et de mécènes, il reste du chemin pour que ses atouts soient mieux reconnus scientifiquement. « Le jardin et le jardinage ne sont pas encore entrés dans le cénacle des thérapies reconnues et incontournables », déplore Anne Chahine, présidente de l’association Jardins et Santé.
1 Lohr, V. I., & Pearson-Mims, C. H. (2000). Physical discomfort may be reduced in the presence of interior plants. HortTechnology, 10(1), 53-58. 3. Ulrich, R. S. (1984). View through a window may influence recovery from surgery. Science, 224: 420- 421.
2 www.lefigaro.fr/jardin/2018/11/01/30008-20181101ARTFIG00240-alzheimer-quand-le-jardin-soigne-et-apaise.php